Lux Æterna, hymne aux victimes de Polytechnique Montréal
Chaque 6 décembre, le Québec se recueille pour commémorer la tuerie de 1989 à l’École Polytechnique de Montréal, et plus largement les violences commises à l’endroit des femmes.
La ville de Laval a lancé un concours d’art public, ouvert exclusivement aux femmes compositrices professionnelles, pour écrire une pièce commémorant l’événement. Parmi les 14 candidatures reçues – le chiffre est de circonstances – c’est celle d’Estelle Lemire (ma mère) qui a été retenue.
Au moment de ce tragique épisode, j’étais l’une des rares jeunes femmes étudiantes en composition, discipline jusque-là majoritairement réservée aux hommes. D’une certaine manière et comme la plupart des femmes de ma génération tentant de faire son chemin dans un monde masculin, j’ai reçu le choc de la tuerie de la Polytechnique avec un vif émoi, le plus grand des étonnements et une infinie tristesse.
— Estelle Lemire
Pour cette série, j’ai sélectionné 14 photos rendues en noir et blanc.
L’esthétique monochrome m’apparaissait incontournable d’entrée de jeu (et fait notamment écho au film du cinéaste québécois Denis Villeneuve).
Les conditions photographiques lunaires (faible luminosité due à la situation nocturne, éclairage inégal, neige) m’ont contraint d’abandonner la finesse sur le plan technique; mais heureusement, le recours au noir et blanc masque le bruit photographique dû à l’augmentation de la sensibilité de l’appareil.
Je suis de cette génération qui croit malgré tout dans la conciliation, l’égalité, le partage, la collégialité, l’évolution tranquille des mentalités. Je suis de celles dont les grand-mères ont obtenu le droit de vote, dont les mères ont cessé de porter le nom de leur mari et aujourd’hui mère de 3 jeunes gens de la génération #MoiAussi.
— Estelle Lemire
Cette commémoration témoigne à nouveau comment l’art – voire l’art public, chose très rare en musique, comme le fait remarquer Estelle Lemire – peut nous réunir, nous rassembler, et nous aider à mieux nous comprendre.
À nous de préserver cette lumière porteuse de souvenir et d’espoir.